La contestation de l’infraction constatée par radar automatique
Auteur : BROGINI Benoît
Publié le :
15/05/2013
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2013
Les infractions constatées par radars fixes ou mobiles sont les évènements les plus redoutés de l’automobiliste, d’une part pour le coût que cela représente, mais surtout pour la perte de points impactée sur le permis de conduire.
Radars automatiques: contester l'amende et éviter la perte de pointsLes infractions constatées par traitement automatisé et par radars fixes ou mobiles sont les évènements les plus redoutés de l’automobiliste, d’une part pour le coût que cela représente, mais surtout pour la perte de points impactée sur le permis de conduire.
La politique des gouvernements, de droite comme de gauche, de répression systématique des infractions au Code de la Route, a eu pour conséquence notoire la multiplication des contrôles automatisés par l’installation de radars fixes ou mobiles, et bien évidemment, la multiplication des amendes.
Ces contrôles automatisés sont effectués par un radar qui relève automatiquement la réalisation d’une infraction déterminée par un véhicule passant dans son champ d’action (pour excès de vitesse, absence d’arrêt à un feu de signalisation, non respect des distances de sécurité, franchissement de lignes blanches…) et prend une photographie de celui-ci.
Les clichés enregistrés par ces contrôleurs électroniques sont par la suite transmis à un service automatisé de traitement des données qui édite électroniquement une amende qui est expédiée au titulaire de la carte grise correspondant à la plaque d’immatriculation relevée sur la photographie.
Ce processus est quasiment entièrement électronique et s’effectue sans qu’une personne physique n’ait à intervenir.
Dans la majorité des cas, les clichés relevés ne permettent pas l’identification du conducteur, que ce soit du fait de la prise en photographie de l’arrière du véhicule ou parce que la définition de l’image ne permet pas de distinguer clairement les traits du contrevenant.
Le Code Pénal, en son article 121-1, énonce le principe selon lequel « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait » et cela est repris par le Code de la Route, à l’article L 121-1, qui précise que « le conducteur d'un véhicule est responsable pénalement des infractions commises par lui dans la conduite dudit véhicule. »
Ainsi, on peut déduire de ces articles que, si le cliché du radar ne permet pas l’identification du conducteur, sa responsabilité pénale ne peut pas être retenue et la contestation de celle-ci devrait donc l’exonérer de toute perte de points sur son permis et de toute amende.
Toutefois, l’article L121-3 du Code de la Route tempère cette interprétation en précisant que, si la responsabilité pénale n’est pas retenue du fait de la non identification du conducteur, le titulaire de la carte grise reste toutefois redevable pécuniairement de la contravention.
L’article L121-3 du Code la route concerne uniquement les « amendes encourues pour des contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées, sur le respect des distances de sécurité entre les véhicules, sur l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules. »
Il est donc nécessaire de se pencher sur la faculté de contestation du titulaire de la carte grise du véhicule contrôlé automatiquement et sur les moyens dont il dispose pour obtenir une relaxe totale.
Bien évidemment, ces contestations ne peuvent exister que si le cliché ne permet pas d’identifier le conducteur, ce qui sera considéré comme tel pour l’ensemble des cas abordés.
I – Le principe de la contestation de l’avis d’amende :
Lorsqu’un véhicule commet une infraction sanctionnée par l’article L121-3 du Code de la Route, le radar installé pour contrôler ce type de comportement prend immédiatement deux clichés, l’un avec un flash, l’autre sans, afin de pouvoir relever la plaque d’immatriculation du véhicule.
C’est par le biais de la plaque d’immatriculation apparaissant sur le cliché que les services administratifs compétents adressent l’avis de contravention au titulaire de la carte grise, et c’est donc à lui de contester la contravention.
A – La contestation de la contravention :
Dès réception d’un avis d’amende pour une contravention relevée par le moyen d’un contrôle automatisé électronique, le titulaire de la carte grise peut solliciter la transmission des éléments la caractérisant, à savoir le cliché et les caractéristiques techniques de l’appareil ayant procédé à la photographie.
Indépendamment de cette demande, ou suite à celle-ci, le titulaire de la carte grise peut adresser une requête en exonération par courrier RAR vers l’établissement administratif désigné dans l’avis de contravention.
A cette fin, il est nécessaire que le montant de l’amende indiqué sur l’avis soit consigné par un règlement en chèque, ou tout autre titre de paiement qui devra alors être justifié, en même temps que la contestation est envoyée.
Il faut être rapide et diligent car le délai pour contester une amende est celui donné pour effectuer le règlement avant toute majoration, soit quarante cinq jours, et la consignation du montant est indispensable pour la recevabilité de la contestation.
Il importe de mentionner dans la lettre de contestation que le chèque joint est une consignation et non un paiement, car le paiement de l’amende emporte acceptation de celle-ci et donc de la responsabilité pénale.
L’exonération de la consignation n’est possible que si le titulaire de la carte grise justifie du vol ou de la destruction du véhicule, ou donne l’identité et l’adresse du véritable conducteur.
Si le véhicule n’a ni été volé ni détruit et que le titulaire ignore, ou ne veut pas transmettre, l’état civil de la personne conduisant le véhicule au moment de l’infraction, il va être convoqué devant le Tribunal de Police compétent afin d’être entendu sur les faits.
Il ne pourra pas être imposé au titulaire de la carte grise de livrer l’identité de la personne qui conduisait le véhicule, que ce soit par le Président du Tribunal ou par le représentant du Procureur de la République, et aucune sanction ne pourra être prise à son encontre sur ce fondement.
B – Les conséquences de la contestation :
Le titulaire de la carte grise, lorsqu’il conteste la contravention traitée automatiquement, va être convoqué devant le Tribunal de Police du ressort du lieu de l’infraction.
Partant du principe que la photographie prise par le système automatisé ne permet pas d’identifier le conducteur, la personne qui conteste sera donc convoquée sur le fondement de l’article L121-3 du Code de la Route, puisque l’article L121-1 du Code de la Route ne peut pas trouver à s’appliquer.
L’article L121-3 exclut la responsabilité pénale du titulaire de la carte grise mais prévoit en revanche qu’il est redevable pécuniairement de l’amende.
Le Conseil Constitutionnel a jugé cette disposition légale conforme à la Constitution.
L’alinéa 2 de l’article L121-3 est encore plus explicite puisqu’il précise que «la personne déclarée redevable en application des dispositions du présent article n'est pas responsable pénalement de l'infraction. Lorsque le tribunal de police ou la juridiction de proximité, y compris par ordonnance pénale, fait application des dispositions du présent article, sa décision ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être prise en compte pour la récidive et n'entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. »
En d’autres termes, la personne qui conteste une contravention est sûre de ne pas perdre de points sur son permis, si et seulement si on ne peut pas l’identifier clairement sur le cliché.
L’article L121-32 s’applique aux pertes de points sanctionnant « les contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées, sur le respect des distances de sécurité entre les véhicules, sur l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules. »
En revanche, le montant de l’amende est immédiatement majoré et le représentant du Procureur de la République n’hésite généralement pas à solliciter une condamnation pécuniaire à hauteur de la valeur de l’amende majorée, voire plus selon les explications fournies par le requérant.
La somme totale à régler est bien évidemment déduite de l’amende consignée préalablement, mais est augmentée des droits fixes de procédure à hauteur de 22 euros, l’ensemble pouvant être diminué par l’abattement de 20% en cas de paiement dans le mois du délibéré ou de la notification du jugement.
Néanmoins, les sommes engagées peuvent représenter des montants non négligeables et il est donc préférable de solliciter la relaxe pure et simple, à la fois sur le plan de la responsabilité pénale mais aussi pécuniaire.
II – Les moyens de relaxe :
En dehors de l’application de l’article L121-3 du Code de la Route déclarant le titulaire de la carte grise redevable pécuniairement mais non responsable pénalement, le Tribunal de Police peut aussi relaxer celui-ci tant au niveau pécuniaire que pénal, c’est-à-dire, le dispenser à la fois de perte de points mais aussi de l’amende.
Pour ce faire, le titulaire de la carte grise doit démontrer qu’il n’était pas au volant du véhicule, soit à cause d’un fait extérieur, soit parce qu’une autre personne conduisait.
A – L’élément extérieur justifiant la relaxe:
Afin d’être relaxé de toute poursuite, pénale ou pécuniaire, le titulaire de la carte grise doit démontrer qu’un fait extérieur l’exonère de toute responsabilité.
Tout d’abord, il s’agit du cas classique de la force majeure, c’est-à-dire un évènement extérieur, imprévisible et irrésistible qui a rendu inévitable la commission de l’infraction en dehors de toute volonté du contrevenant.
Une panne du véhicule, ou d’un des éléments de son électronique, peut être envisagée comme un cas de force majeure, si bien sûr cette panne revêt les caractéristiques imprévisibles, irrésistibles et extérieures à la personne.
La Cour de Cassation a jugé, dans son arrêt du 12 février 1957, qu’une panne d’essence n’était pas un cas de force majeure puisque tout conducteur était compétent pour la prévoir, l’anticiper et l’éviter.
Le vol constitue tout autant une cause de force majeure susceptible de permettre l’exonération de responsabilité pénale et pécuniaire du titulaire, mais encore faut-il pour cela que celui-ci présente les déclarations de plainte pour vol faites en service de police et dénoncées à son assurance.
De même, si le véhicule est loué, la responsabilité pécuniaire est supportée par le locataire dont l’identité complète devra être transmise par le titulaire de la carte grise aux autorités administratives ou au Tribunal.
Cela est généralement facilité par le fait que le loueur de véhicule possède une copie du permis de conduire qu’il transmet aux services administratifs dès réception de l’amende.
Il en va de même en cas de prêt de véhicule par une carrosserie ou un garage, le temps des travaux sur le véhicule du client, ou lorsque le titulaire prête son véhicule à un tiers.
Il est à noter que, dans ces cas, le locataire ou la personne ayant profité du prêt a toujours la possibilité de contester la contravention, avec les mêmes moyens que le titulaire de la carte grise.
En dehors de ces éléments extérieurs, le titulaire de la carte grise peut s’exonérer de toute responsabilité en démontrant qu’il ne pouvait pas être au volant du véhicule au moment de l’infraction.
B – L’établissement de l’impossibilité de commettre l’infraction
L’article L121-3 précise que le titulaire de la carte grise est redevable pécuniairement de l’amende, à moins « qu'il n'apporte tous éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction. »
La plupart des titulaires de carte grise contestent la contravention reçue en soulevant l’impossibilité de déterminer l’identité du conducteur, le cliché ne permettant pas d’identification.
En se limitant à cette défense, le titulaire évite ainsi la perte des points sur son permis de conduire mais écopera tout de même d’une amende qui sera réévaluée par le représentant du Parquet et le plus souvent suivie à la lettre par le Magistrat en charge, cette somme pouvant être d’un montant assez conséquent.
Or, si le titulaire de la carte grise (ou le propriétaire du véhicule) n’était réellement pas au volant du véhicule au moment de l’infraction, il se prive de la possibilité d’être exonéré à la fois de la perte de point mais aussi de l’amende.
L’établissement de l’impossibilité pour le titulaire de la carte grise d’être au volant au moment de l’infraction n’est toutefois pas chose aisée.
Tout d’abord, la Cour de Cassation a établi qu’il ne suffisait pas de prétendre qu’une autre personne conduisait, les simples allégations sans dénoncer l’identité du conducteur ne constituant pas des éléments suffisant (Tribunal de Police de Grenoble 8 novembre 2007 et Cass Crim 21 septembre 2004).
Néanmoins, si le cliché démontre par lui-même que le titulaire de la carte grise n’est pas la personne au volant, l’exonération est totale.
En ce sens, la Cour de Cassation a jugé que ne pouvait être reconnu responsable pénalement ni redevable pécuniairement un titulaire alors que le cliché met en évidence que le conducteur est de sexe opposé (Tribunal de Police d’Angers 11 février 2003, Cass Crim 17 février 2004, et Cass Crim 1er avril 2008).
Enfin, le titulaire de la carte grise peut solliciter sa relaxe par le moyen d’attestations de témoins confirmant l’impossibilité qu’il soit au volant au moment de l’infraction.
Une simple attestation d’un témoin déclarant qu’il hébergeait le requérant au moment des faits a été déclarée comme insuffisante par un Jugement, confirmé par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation dans son arrêt 12 mars 2008.
A l’inverse, a été retenue comme un élément permettant l’exonération du paiement de l’amende, l’attestation d’un témoin confirmant que le prévenu était dans les locaux de sa société au moment des faits (Cass Crim 1er octobre 2008).
La justification d’un voyage à l’étranger, d’une hospitalisation ou de la présence sur son lieu de travail, au moment des faits est retenue comme élément justifiant une relaxe pécuniaire également (Cass Crim. 25 sept. 2007).
Il convient à nouveau de rappeler que, dans ces cas, l’exonération n’est pas soumise à la dénonciation du véritable conducteur et qu’il suffit donc au titulaire de démontrer qu’il n’était pas au volant au moment de l’infraction.
Toutefois, les éléments produits par le titulaire de la carte grise sont soumis à l’appréciation souveraine du Juge et celui-ci contrôle leur crédibilité ainsi que, selon les termes de l’arrêt de la Chambre Criminelle du 1er octobre 2008, si « rien ne permet de mettre en doute la sincérité de l’attestation produite. »
Il semble ainsi que la Cour de Cassation retienne plus aisément comme attestations sincères et crédibles celles relatives à la vie professionnelle ou à la santé du prévenu et écarte plus fréquemment les attestations émanant de la famille ou des amis de celui-ci.
Il est à noter, pour finir, que si le cliché révèle une infraction non prévue par l’article L121-3, comme par exemple le fait que le conducteur soit en train de téléphoner au volant, le titulaire de la carte grise ne pourra pas être déclaré redevable pécuniairement pour cette contravention (Cass Crim 28 septembre 2005).
Cet article n'engage que son auteur.
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