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Bail d'habitation: pas de droit au maintien dans les lieux pour les enfants majeurs

Bail d'habitation: pas de droit au maintien dans les lieux pour les enfants majeurs

Auteur : BROGINI Benoît
Publié le : 01/02/2016 01 février févr. 02 2016

Traversant les époques pour faire appliquer la législation antérieure au 6 juillet 1989 concernant les baux d’habitation, la Cour de Cassation rend ici un arrêt d’une logique imparable.Un preneur souscrit personnellement un contrat de bail le 1er février 1959, l’acte relevant donc de la loi du 1er septembre 1948 sur les baux d’habitation, n°48-1360.

Le preneur, marié et père de famille, décède le 26 août 1994, son épouse et ses enfants continuant à occuper les lieux, le bail étant transmis au conjoint survivant selon les dispositions de l’article 5 de la loi de 1948.

Le 25 novembre 2002, le bailleur délivre un congé à l’épouse, qui prend visiblement effet, sans que la dame ne quitte l’immeuble, tout en continuant à exécuter ses obligations de locataire.

Madame décède le 27 mars 2003 et l’un des enfants du couple se maintient dans les lieux.

Le propriétaire l’assigne alors en Justice en vue de son expulsion, le considérant comme occupant sans droit ni titre.

Le Tribunal d’Instance ordonne l’expulsion du fils, décision qui est confirmée par la Cour d’Appel de PARIS.


La Cour de Cassation, finalement, rejette le pourvoi du rejeton occupant, considérant le fils comme ne pouvant pas bénéficier du statut d’occupant de bonne foi mais bel et bien d’occupant sans droit ni titre.

S’il est vrai que l’article 1742 du Code Civil, dont se prévalait le fils, mentionne que le contrat de louage ne s’éteint pas avec le décès du preneur, la lecture des moyens de l’arrêt ne laisse aucune surprise quant au sens de celui-ci.

En effet, il ressort des éléments du dossier que le bail signé en 1959 par le preneur stipulait que « la location sera résiliée de plein droit à compter du premier jour du terme qui suivra le décès du preneur, en conséquence de quoi, ses héritiers ne pourront se prévaloir des dispositions de l’article 1742 du Code Civil. »

Cette clause contractuelle d’exclusion de la transmission aux héritiers est validée par la Jurisprudence de manière constante et ce depuis, d’ailleurs, une décision de la Cour de Cassation de 1959, année de la signature du bail de l’espèce.

Par contre, le bail n’excluait pas de la transmission le conjoint survivant du preneur, la loi de 1948 mentionnant expressément dans son article 5 l’époux, comme personne susceptible de se voir transmettre un bail après décès.

De ce fait, c’est tout naturellement que le bail a été transmis à Madame, qui a continué à en jouir jusqu’au congé donné en 2002, et même plus après, puisqu’elle est demeurée occupante des lieux tout en continuant à régler son loyer au bailleur.

A l’inverse, le fils n’a jamais eu aucun statut dans cette location.

Après le décès de son père, il continue à occuper les lieux mais c’est sa mère qui est titulaire du bail par effet de l’article 5.

Après le décès de sa mère, les héritiers n’étant pas prévus dans les personnes susceptibles de se voir transmettre le bail.



C’est donc en vain qu’il soutient être un occupant de bonne foi, selon la définition de l’article 4 de la loi de 1948, puisque les conditions fixées par cet article pour obtenir cette qualité sont, d’une part de remplir ses obligations de locataires, ce qu’il fait, mais, d’autre part, que :

« Sont réputés de bonne foi les locataires, sous-locataires, cessionnaires de baux, à l'expiration de leur contrat, ainsi que les occupants qui, habitant dans les lieux en vertu ou en suite d'un bail écrit ou verbal, d'une sous-location régulière, d'une cession régulière d'un bail antérieur, d'un échange opéré dans les conditions légales, exécutent leurs obligations. »

La mère est donc occupante de bonne foi, sans discussion, puisqu’elle continue d’occuper suite à l’expiration de son contrat.

Ce n’est pas le cas du fils qui n’a jamais bénéficié d’un bail écrit ou verbal, ni d’une sous-location régulière.

En effet, le bailleur n’a pas fait signé de nouveau contrat à la mort de la mère, mais, en plus, il ressort de l’examen de l’arrêt, que le propriétaire ne lui a jamais délivré de quittance de loyer, mais, au contraire, des reçus d’indemnité d’occupation.

Si le bailleur lui avait délivré les quittances, il y aurait pu avoir discussion sur l’existence d’un bail verbal, mais dans sa grande sagesse, le propriétaire a ôté cette possibilité des débats.

Ainsi, en l’absence de transmission du bail et d’existence d’un bail verbal, la Cour de Cassation ne pouvait que confirmer la position du Tribunal d’Instance et de la Cour d’Appel et rejeter le pourvoi formé par le fils.



Par ailleurs, il est à noter que l’article 5 prévoit que « nonobstant les dispositions de l'article 1742 du code civil, même en l'absence de délivrance d'un congé au locataire, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire. » En conséquence, que le bailleur ait délivré ou pas le congé à la mère, le décès de celle-ci emportait en tout état de cause fin du bail, rendant de ce fait le fils occupant sans droit ni titre.


*** Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 17 décembre 2015 n°12-20672 ***



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © herreneck - Fotolia.com

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