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Actualités en procédure administrative

Actualités en procédure administrative

Auteur : CHARLES-NEVEU Brigitte
Publié le : 29/12/2010 29 décembre déc. 12 2010

L’actualité de la procédure administrative est surtout marquée par le succès du contrôle de constitutionnalité résultant de l’article 61-1 de la Constitution, en vigueur depuis le 1er mars dernier.

Actualité législative et jurisprudentielle en procédure administrative


Les QPC devant les juridictions administratives

L’actualité de la procédure administrative est surtout marquée par le succès du contrôle de constitutionnalité résultant de l’article 61-1 de la Constitution, en vigueur depuis le 1er mars dernier. Les premières questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) ne se sont pas fait attendre.

A la fin août 2010, plus du quart des QPC dont le Conseil d’Etat a été saisi ont été transmises au Conseil Constitutionnel.

Elles concernent surtout la matière fiscale.

Le bilan est considéré comme tout à fait positif (Lexis Nexis, dr. Adm. N°11 nov. 2010 a. 75 – Dalloz Actu. 14.09.2010, …)

Ce bilan est à comparer à celui de l’ordre judiciaire, beaucoup plus mitigé…et critiqué (Dalloz 09.09.2010 n°30, point de vue, Ph. Waquet p. 1951 – Dalloz Actu. 30.11.2010)

Sur contrôle de constitutionnalité et contrôle de conventionalité, priorités, articulation : voir CE 02.04.2009 - CJUE 22.06.2010


Le décret de février 2010

Dans le prolongement des décrets 2008-225 du 6 mars 2008 relatif à l'organisation et au fonctionnement du Conseil d'Etat, et 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public, le décret 2010-164 du 22 février 2010 a notamment modifié les règles relatives à l’expertise, à l’instruction et à la clôture de l’instruction, dans le sens d’une meilleure efficacité.

Il est à noter également que les réformes successives ont favorisé les cas d’intervention du juge unique, contraire à la culture administrative dominée par le principe de collégialité.

A tel point qu’un syndicat de magistrats a posé une QPC relative à ces dérogations. Mais le Conseil Constitutionnel par décision du 14 octobre 2010 a considéré que le recours au juge unique – qui reste théoriquement exceptionnel – est conforme à la constitution.

Voir également : AJDA n° 29 du 13.09.2010 p.1623 et s. « Des chiffres sans les lettres » Elsa Costa.


Procédure administrative et procès équitable

Le report d’audience – qui n’est pas un droit et dont le refus n’a pas à être motivé - doit être accordé lorsque des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l’exigent.

C’est la position adoptée par la Conseil d’Etat dans un arrêt du 16 juillet 2010 (req. n° 294239). Cette solution participe du caractère contradictoire de l’audience, renforcé par le nouveau statut du rapporteur public.

La pénétration progressive des principes du procès équitable en procédure administrative a trouvé en effet une illustration emblématique avec la réforme relative à la place du rapporteur public dans le procès.

Le bilan de la réforme reste toutefois mitigé …

En effet, dans la majorité des juridictions, le « sens » des conclusions du rapporteur public – communiqué 24 à 48 heures avant l’audience - se limite à l’indication de l’accueil ou du rejet de la requête, sans que les principaux moyens retenus soient précisés, ne permettant donc pas un exercice effectif du contradictoire.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat ayant précisé que le rapporteur public ne peut changer le sens de ses conclusions une fois publiées sur le site SAGACE, on a pu assister au développement de la pratique de conclusions « alternatives ».

Enfin, la prise ou reprise de parole après audition des conclusions du rapporteur public remporte un franc succès auprès des avocats, tandis que les rapporteurs publics peinent parfois à s’adapter à leur nouvelle place dans le procès administratif.


Une pierre dans le jardin de la dualité des ordres juridictionnels ?

Dans un arrêt rendu le 18 novembre 2010 (Baudouin/France req. n° 35935/03) en matière d’hospitalisation d’office, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a jugé que la séparation des compétences entre les juridictions judiciaires et administratives viole le droit au recours effectif de la personne internée.

Trop de juges tue l’accès au juge …

Les difficultés découlant de la juxtaposition des deux régimes administratif et judiciaire dans le contentieux de l’hospitalisation d’office n’étaient pas nouvelles et avaient déjà été dénoncées (Cf. Francis MALLOL « Troubles mentaux et contrôle juridictionnel des mesures d’hospitalisation d’office » à propos de CE, 1ère ss section, 11.03.1996, req. n° 164.453 - JCP G, II, 22743).

Mais la position adoptée par la CEDH pourrait être étendue à d’autres domaines où la dualité des ordres juridictionnels complique singulièrement la tâche des justiciables …


Prescription des créances publiques

Dans quelle mesure la réforme de la prescription civile peut-elle influer sur le délai de prescription des créances publiques ?

Si l’on considère que le Conseil d’Etat s’est traditionnellement référé au code civil pour fixer le délai de prescription des créances publiques (pour une application récente : CE 12.03.2010 n° 309118), alors ce délai jusqu’ici trentenaire devrait être ramené à 5 ans.

Cette solution atténuerait le déséquilibre entre le délai de prescription des dettes publiques (prescription quadriennale) et celui des créances publiques.


Arbitrage et juge administratif

L’affaire « Tapie » a donné l’occasion au Tribunal Administratif de Paris de rendre le 14 octobre 2009 un jugement remarqué illustrant les perspectives procédurales offertes par les différents ordres juridictionnels.

On se souvient que le tribunal arbitral composé de MM. Jean-Denis Bredin, Pierre Mazeaud et Pierre Estoup avait alloué la somme de 240 millions d’euros en réparation des fautes commises par le Crédit Lyonnais à l’égard du groupe Tapie et 45 millions d’euros en réparation du préjudice moral des époux Tapie …

Le Tribunal Administratif de Paris était alors saisi, à la requête de divers députés et contribuables, de l’annulation des décisions de la ministre de l’économie (Christine Lagarde) et de l’EPFR (établissement créé pour assurer la tutelle de l’Etat sur le Crédit Lyonnais) ayant consisté à ratifier le choix de l’arbitrage et l’acceptation de la sentence arbitrale du 7 juillet 2008.

Jugée partiellement recevable, la requête a toutefois été rejetée au fond au terme d’une motivation brillamment critiquée par le professeur Paul CASSIA au Recueil Dalloz 2010 (chronique p. 690). Certains des succombants avaient annoncé leur décision de faire appel. La Cour des Comptes serait saisie et envisagerait une saisine de la Cour de Discipline Budgétaire.


Parallèlement, le comité des ministres du Conseil de l’Europe a adopté le 17 novembre dernier une recommandation aux états membres sur l’indépendance, l’efficacité et les responsabilités des juges, tandis que le conseil consultatif des juges européens publiait une magna carta des juges, insistant sur l’indépendance statutaire fonctionnelle et financière des juges, plaidant pour une justice transparente, le juge devant agir en vue d’assurer l’accès à un règlement rapide, efficace et à un coût raisonnable des litiges …

Ces recommandations s’appliquent-elles aussi à l’arbitrage ?





Cet article n'engage que son auteur.

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