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Légalité du financement des équipements publics

Auteur : GOVERNATORI Jean-Joël
Publié le : 15/01/2013 15 janvier janv. 01 2013

L’action administrative en matière de projet foncier et de promotion immobilière ne repose plus uniquement sur la prérogative de puissance publique, en effet, le contrat est devenu un outil privilégié de la politique d’aménagement foncier.

La question de la légalité du financement des équipements publics en tout ou partie par les constructeurs privés dans le cadre d’une convention PUP ou PAEL’action administrative en matière de projet foncier et de promotion immobilière ne repose plus uniquement sur la prérogative de puissance publique, en effet, le contrat est devenu un outil privilégié de la politique d’aménagement foncier.

La convention de Projet Urbain Partenarial (PUP) traduit cette tendance à la contractualisation de l’action publique dans le domaine de la gestion des territoires.

L’article L. 332-11-3 du code de l’urbanisme pose la règle suivant laquelle «Dans les zones urbaines et les zones à urbaniser délimitées par les plans locaux d'urbanisme ou les documents d'urbanisme en tenant lieu, lorsqu'une ou plusieurs opérations d'aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d'équipements autres que les équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15, le ou les propriétaires des terrains, le ou les aménageurs et le ou les constructeurs peuvent conclure avec la commune ou l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme ou le représentant de l'Etat, dans le cadre des opérations d'intérêt national mentionnées à l'article L. 121-2, une convention de projet urbain partenarial prévoyant la prise en charge financière de tout ou partie de ces équipements.

Cette convention ne peut mettre à la charge des propriétaires fonciers, des aménageurs ou des constructeurs que le coût des équipements publics à réaliser pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans le périmètre fixé par la convention ou, lorsque la capacité des équipements programmés excède ces besoins, la fraction du coût proportionnelle à ceux-ci.

La convention fixe les délais de paiement. La participation peut être acquittée sous forme de contribution financière ou d'apports de terrains bâtis ou non bâtis ».

L’outil PUP est une création récente (loi n°2009-323 du 25 mars 2009) et il existe peu de recul jurisprudentiel et doctrinal pour cerner le degré des participations privées qui repose sur les critères suivants : lien direct et proportionnalité.

En revanche, en matière de PAE (programme d’aménagement d’ensemble) et de fiscalité d’urbanisme, il est possible de mettre en exergue certains principes qui peuvent être transposés dans l’hypothèse du PUP et ce afin de convenir d’un mode d’emploi à destination des collectivités territoriales.

D’une part, au regard de la jurisprudence, il est primordial que les cocontractants publics déterminent les aménagements prévus et leur coût prévisionnel.

A ce titre, M. Jean-François Joye, Maître de conférences de droit public, université de Savoie écrit que «le besoin de déterminer les éléments du PAE avec précision est réaffirmé ici avec force (CAA Marseille 29 oct. 1998, Commune de Pertuis, req. n° 96MA02753). Les aménagements prévus sont ceux nécessaires à la réalisation d'équipements publics au sens large du terme (réseaux, mais aussi équipements socioculturels, sportifs, etc.). Ceux-ci doivent répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier. Cela exclut, et ce n'est en rien nouveau, des équipements généraux dont l'usage est trop éloigné des besoins locaux (CE 21 déc. 2007, Commune de Verneuil-l'Etang, req. n° 282580). La notion d'équipement public se démarque également de celle d'équipement propre (v. le distinguo : art. L. 332-15 C. urb. et CE 22 mars 1999, Commune de Roisey, req. n° 154181 ; Rép. min. n° 66232, JOAN 6 avr. 2010, p. 4087). Une fois les équipements identifiés, leur coût est à établir de manière raisonnable compte tenu des éléments dont les collectivités ont la maîtrise. Il n'est pas toujours évident de connaître précisément ce coût : il dépend de la nature des équipements, du phasage, des prestataires, de l'évolution des prix et des aléas économiques».

D’autre part, au regard de la jurisprudence, il faut que les cocontractants publics ventilent le coût entre les constructeurs sur la base d’une répartition objective et circonstanciée.

L’article L.332-9 du Code de l’urbanisme, abrogé par la loi n°2010-1658 du 29 décembre 2010 indiquait que «Dans les secteurs de la commune où un programme d'aménagement d'ensemble a été approuvé par le conseil municipal, il peut être mis à la charge des constructeurs tout ou partie du coût des équipements publics réalisés pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans le secteur concerné. Lorsque la capacité des équipements programmés excède ces besoins, seule la fraction du coût proportionnelle à ces besoins peut être mise à la charge des constructeurs. Lorsqu'un équipement doit être réalisé pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans plusieurs opérations successives devant faire l'objet de zones d'aménagement concerté ou de programmes d'aménagement d'ensemble, la répartition du coût de ces équipements entre différentes opérations peut être prévue dès la première, à l'initiative de l'autorité publique qui approuve l'opération.

Dans les communes où la taxe locale d'équipement est instituée, les constructions édifiées dans ces secteurs sont exclues du champ d'application de la taxe.

Le conseil municipal détermine le secteur d'aménagement, la nature, le coût et le délai prévus pour la réalisation du programme d'équipements publics. Il fixe, en outre, la part des dépenses de réalisation de ce programme qui est à la charge des constructeurs, ainsi que les critères de répartition de celle-ci entre les différentes catégories de constructions. Sa délibération fait l'objet d'un affichage en mairie. Une copie de cette délibération est jointe à toute délivrance de certificat d'urbanisme.

Sont exonérées de la participation prévue au présent article les constructions édifiées dans une zone d'aménagement concerté lorsque leur terrain d'assiette a fait l'objet d'une cession, location ou concession d'usage consentie par l'aménageur de la zone ou d'une convention par laquelle le propriétaire du terrain s'engage à participer à la réalisation de ladite zone».

Contrairement au PAE, les dispositions relatives au PUP mentionnent expressément que «Cette convention ne peut mettre à la charge des propriétaires fonciers, des aménageurs ou des constructeurs que le coût des équipements publics à réaliser pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans le périmètre fixé par la convention ou, lorsque la capacité des équipements programmés excède ces besoins, la fraction du coût proportionnelle à ceux-ci» et ne laisse pas le soin à la collectivité territoriale de fixer les critères de répartition.

Il n’empêche que les grands principes dégagés en matière de PAE doivent servir de tuteur au cocontractant public pour les PUP.

Il a été jugé qu’ «une commune ne peut faire peser sur un lotisseur des opérations à réaliser hors du secteur visé par le plan et qui, par leur nature, ne peuvent être tenues comme principalement rendues nécessaires par les besoins des futurs habitants du lotissement ; CAA Paris 12 mai 2005, Société Soteba c/ Commune de Verneuil-l'Etang, req. n° 01PA04259, Lebon T. ) ou encore que « les équipements prévus ont vocation à répondre à des besoins excédant largement ceux des habitants actuels et futurs des secteurs concernés par ces programmes et qu'il est prévu par la délibération que les constructeurs supporteront de 40 à 100 % du coût de ces équipements, aucun lien précis n'est établi entre ces équipements et les besoins des habitants et futurs habitants desdits secteurs permettant de vérifier que seule la fraction du coût proportionnelle à ces besoins a été mise à la charge des constructeurs ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que le conseil municipal de la COMMUNE DE BELIN-BELIET avait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 332-9 du code de l'urbanisme (CAA Bordeaux 15 avr. 2010, Commune de Belin-Béliet, req. n° 09BX02013).

La Cour Administrative d’appel de Paris dans un arrêt récent en date du 6 décembre 2012 pose le principe suivant lequel que «les contributions mises à la charge des bénéficiaires d'autorisations de construire afin d'assurer tout ou partie du financement des équipements publics prévus par le programme d'aménagement d'un secteur et destinés à répondre aux besoins des habitants ou usagers des constructions édifiées dans ce secteur doivent être déterminées en tenant compte, au moins principalement, de la consistance des constructions, c'est-à-dire, le cas échéant, de leur nature ou destination, de leur localisation et, dans tous les cas, de leurs dimensions ; que, le montant de la participation exigible de chaque bénéficiaire d'une autorisation de construire ne peut légalement être sans lien avec l'importance de la construction autorisée, et résulter de la seule superficie constructible du terrain sur lequel doit être édifié cette construction ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction légale entre les autorisations de lotir et les permis de construire, la participation fixée par délibération de la commune de Souppes-sur-Loing du 23 juin 1999 en fonction de la seule superficie des terrains est illégale» (CAA 6 décembre 2012, req. n°11PA02353).

Cet arrêt traduit l’encadrement strict des participations privées et s’inscrit dans la ligne jurisprudentielle suivant laquelle « La SHON autorisée ou, aujourd'hui la surface de plancher, est l'assiette objective de la participation. Il a été jugé illégal à de multiples reprises de fixer un tarif représentant des euros par m² constructibles du terrain d'assiette de la construction autorisée (CE 13 juill. 2006, Commune de Montady c/ Lopez, req. n° 266093, Lebon 348 ; AJDA 2006. 1531 ; RDI 2006. 396, obs. P. Soler-Couteaux ; v. aussi CAA Marseille 6 juill. 2000, Commune de Saint-Cannat, BJDU 2000. 248).

Enfin, un arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Marseille en date du 16 juin 2011 (req. N° 09MA02907) rappelle qu’il est possible à la personne publique de fragmenter le coût d’un ouvrage en jugeant que «les équipements programmés, destinés à être financés par la commune, concernent un carrefour giratoire à l’intersection du chemin des Montilles et de la RD 37 E 10, l’aménagement de la voie entre ce giratoire et le chemin des pêcheurs (ancienne voie départementale) et de la place centrale de Vendres-Plage, l’extension de la station d’épuration, le bétonnage du fossé d’évacuation des eaux pluviales en bordure du chemin des Montilles ainsi que le réaménagement du cordon dunaire du littoral de Vendres ; que la société Camping de la Yole soutient qu’en méconnaissance de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme précité, les équipements programmés, qui sont des ouvrages d’intérêt communal voire départemental, ne correspondent pas aux seuls besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier ; que, toutefois, eu égard à leur nature et à leur localisation, les équipements en cause doivent être regardés comme répondant directement aux besoins des usagers du Camping de la Yole ; que s’ils ne répondent pas aux seuls besoins de ces usagers, il ressort des pièces du dossier que la délibération du 8 décembre 1987 prévoit que la part de dépenses de réalisation des équipements publics mise à la charge des constructeurs est de 82 % du montant hors taxe du programme ; que, par suite, la société, qui ne critique pas sérieusement le pourcentage ainsi mis à la charge des constructeurs, n’est pas fondée à soutenir que les dispositions de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme ont été méconnues».

Toute la difficulté réside dans l’établissement d’une grille de ventilation des coûts qui doit reposer sur des critères objectifs et circonstanciés. L’écueil à éviter est de déconnecter le financement de l’usage.



Cet article n'engage que son auteur.

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